Un sentiment assez ambivalent m'envahit lorsque je lis les blogs des "vrais" blogueurs. J'entends par là de ceux qui n'ont pas un 0 pointé sur leur blogrank et qui parviennent à écrire plusieurs fois par semaine sur leurs vies, leurs humeurs, leurs passions, etc.
Bien sûr, il y aura toujours ceux qui trouveront cela passionnant d'informer la planète blogueuse (oui... pas envie de dire la "blogosphère"... avec mon zéro renouvelé - ah, parce que je ne vous ai pas dit... z'ont remis ça ! -, ils m'en ont symboliquement exclue, alors j'invente un nouveau monde, sans note, sans charter et sans identité blogationale) de nous informer, disais-je, du changement de papier peint de la chambre du dernier né et du montant de leur dernière note de courses (quoique 58,65 euros pour 4 cacahuètes et du PQ ça devient l'anarchie ! - euh sans jeu de mot entre anar-chie et PQ... cela serait de fort mauvais goût, mais on dérive là, on dérive sec !). Je disais donc... euuh.. oui, ah oui, donc, en gros, il y a et il y aura toujours des personnes qui écrivent tout et n'importe quoi, pourvu que ce soit surtout n'importe quoi, inintéressant, ennuyeux et si possible assez mal écrit... Le package complet toute l'année, pas besoin d'attendre les soldes.
En général leurs aventures trépidantes tournent beaucoup autour des catégories suivantes :
- Questions ménagères et familiales ("soirée galère, praline, mon petit chat est rentré tout sale à la maison et Kévin était encore sur ses devoirs à 21h")
- Courses romantiques et nouveaux achats sexy ("mon doudou / ma chérie va être content(e), je lui ai trouvé un super parapluie sous lequel on pourra se blottir tous les deux pour seulement 4,32 euros!")
- Transports-ras-le-bol et j'vois pas l'rapport ("la sncf ils sont tout pourris parce que mon passe navigo était en panne ce matin ! Heureusement que j'ai un nouveau parapluie offert par mon/ma doudou/ chérie")
- Et bien sûr boulot... enfin râlage du boulot... Mais bon, là on comprend, on ne peut pas le leur reprocher, c'est normal, c'est dans l'ordre des choses. Oui, vous avez remarqué que quand nous écrivons sur notre boulot = râlage?! Y'a jamais personne qui arrive sur son blog et qui se dit : "J'ai passé une super journée, j'ai signé 53 parapheurs en 2h14, record de la semaine battu. La réforme financière et les purchase orders ne me font plus peur. J'ai eu une réunion-comité de toute beauté, je n'ai même pas piqué du nez...enfin si, une fois...mais petite, ça compte pas, en plus personne ne m'a vue... enfin, je crois. J'adore mon boulot, c'est ce qui embellit mes journées, je vais le raconter sur mon blog".
Eux, pour revenir à nos Balzac en herbe, eux je les aime bien.
Je les aime bien parce qu'ils ne te renvoient pas les ratages de ta vie - un peu de loseuse parfois, il faut bien se le dire - en pleine tronche, et ils ont la gentillesse et grande bonté de t'élever un peu au-dessus des masses. Parce qu'ils sont lus ces blogs ! Et pas par trois pékins, qu'on se le dise. C'est bien là la preuve qu'ils ont des vertus apaisantes (c'est comme une tisane à la camomille ou la biafine après une petite heure passée sur les plages du Soconusco). En d'autres termes, tu as toute latitude pour te la péter un peu en lisant leurs blogs, et ça, ça fait un peu planer parfois : "J'ai certes un zéro pointé, mais quand j'écris ce n'est pas pour parler du renouvellement de stock de rouleaux de sopalin et de la recette des coquillettes au beurre, moua".
Oué, ch'sais, j'crâne.
Et puis y'a les autres. Ceux qui te font rire, ceux qui écrivent superbement bien, que tu prends plaisir à lire, ceux qui sont aussi imaginatifs que créatifs et qui ont des tooonnnnes de choses (intéressantes en plus, les salauds!) à raconter, parce que ce qu'ils vivent en une semaine, toi tu mets un an à le vivre...
Eux, ils m'énervent.
Quoi ? Pas vous ?
Mmmm, Vous allez dire que c'est complètement trivial comme sentiment et ça s'appelle très bassement de la jalousie, ou de l'envie, au choix (deux pour le prix d'un ?)
Et bah nan. Enfin, peut-être... ouais bah ch'ais pas, mais quoiqu'il en soit je me pose aussi des questions :
- Comment peuvent-ils vivre autant de choses et passer autant de temps devant leur ordinateur à les raconter ?
- Comment peuvent-ils être aussi positifs au mois de novembre dans une france sarkozyste et réactionnaire ? (Oui, hein, on ne va pas me la faire...pour moi, quand on voit des lycéens défiler pour la retraite c'est qu'on a touché le fond du réactionnisme ; mais quand en plus on voit une de leur représentante syndicale parler politico-intelligemment et moucher un ministre sur un plateau télé, c'est qu'on est allé au bout du bout du fond. Il y a eu un travail de sape de la jeunesse ! On nous a volé nos ados délurés et attardés sans une once de conscience politique pour les remplacer par des vieux de 18 ans !!...Au secours ! A moi ! Faut dire, moi aussi au lycée j'ai fréquenté les hautes sphères médiatiques et j'étais politiquement très très engagée : au moment des manifs de lycéens - je ne sais plus pourquoi - , on faisait grève - en fait je crois qu'on ne savait déjà pas pourquoi - et en tant que grévistes, mes potes et mois avons été interrogés (enfin, l'interviewée c'était moi, taadaaa... parce que j'étais déléguée de classe, visez un peu la mission !) et photographiés pour paraître dans la gazette du Val d'Oise, s'il vous plait ! Tous ensemble, sourire au lèvre, dans un pub, cartes de tarot dans une main et demi dans l'autre... notre engagement politique s'exprimait au tour d'une grenadine et 5 pailles : une garde à coeur ! )
- Comment diable veulent-ils que j'écrive si je passe tout mon temps scotchée à lire leurs blogs si envoûtants ?... :-s...
Et donc, pour parler de nos écrivains talentueux (ou pas) overbloggistes de choc, ce n'est pas parce que je tombe en pâmoison devant certains blogs particulièrement réussis, que je vais leur tirer ma révérence. Je n'aime pas le post-effet qu'ils ont sur moi, sur mon manque de confiance et la grisaille de ma vie parfois.
Alors, je voulais juste rendre un petit hommage aux "intimistes de la confession" de la planète blogueuse. Hommage à tous ceux qui sont capables de mal écrire sur des événements sans intérêts de leur vie mais qui ont le courage de prendre leur plume multimédia et de tenter leur chance pour une inscription sur la liste "ma vie, mon blog et la postérité". Hommage à leur naïveté et leur insouciance d'écrire rien et n'importe quoi pour le partager avec des inconnus en pensant que cela intéressera quelqu'un. Hommage à cette espèce de confiance en eux qui semble les rendre finalement invincibles. Merci d'être là un peu de temps en temps quand même....